Dans le département

Impressionnant débat sur la fin de vie

Des témoignages remplis d’émotion -

23 septembre 2016

Mesdames, Messieurs,

Je vais, en complément de la présentation de Monsieur Alain Milon, Président de la commission des Affaires Sociales au Sénat, aborder deux aspects du contenu de ce texte, qui finalement, a fait l’objet d’un consensus.
Mais auparavant, je voudrais dire quelques mots sur ce débat difficile, difficile parce que le sujet est difficile à aborder, parce que la fin de vie n’est pas un sujet comme les autres, qu’elle est une composante de la vie et fait pleinement partie de notre existence ; c’est en cela que nous ne devons pas fermer les yeux sur les difficultés que représente pour certaines et certains d’entre nous la fin de vie...
Je me suis de longue date investie dans cette question de la fin de vie, avec plusieurs sénatrices et sénateurs de mon groupe, j’ai une pensée particulière pour mon ami Guy Fisher, sénateur du Rhône et qui était membre de votre association...
Mais je dois dire que nous avons nous-mêmes au sein du groupe, une approche et des positions sensiblement différentes.
J’aurais personnellement souhaité que nous puissions aller bien au-delà, et en particulier permettre l’assistance médicalisée pour mourir dans la dignité sans attendre le dernier souffle de vie. J’ai porté et défendu des amendements dans ce sens.
Néanmoins le texte final marque une avancée des droits pour celles et ceux qui vont mourir et je l’ai voté. Il est insuffisant mais je suis convaincue qu’il s’agit d’une étape utile pour faire évoluer la législation, comme évoluent le regard et les attentes de nos concitoyen-ne-s sur la fin de vie et le droit à mourir dans la dignité.
J’en viens au texte, qui ouvre le droit à une sédation profonde et continue en fin de vie si la souffrance du patient ne peut être apaisée par les autres types de soins palliatifs. J’aurai voulu que le droit à la sédation profonde puisse s’exercer avant que la souffrance, physique et psychique, ne devienne « insupportable », avant la toute dernière extrémité.
D’autant que la sédation profonde et continue est déjà une technique de soins palliatifs régulièrement utilisée par les équipes médicales quand la situation du patient le justifie. On ne crée donc pas réellement un droit nouveau. Il s’agit là de garantir que, selon l’expression de Jean-Claude Ameisen, le président du Comité Consultatif National d’Ethique, une personne en fin de vie qui a décidé l’interruption de traitements pourra dormir jusqu’à ce que la mort survienne.
Toutes et tous nous sommes favorables aux soins palliatifs et à l’absence de souffrance en fin de vie. Nous ne pouvons donc que nous féliciter s’ils sont mieux garantis.
Mais, comme le disait Alain Milon, c’est là d’abord une question de moyens et pas, uniquement - rajouterais-je, de textes ; oui, il s’agit bien de la question des financements de la sécurité sociale, de la santé, de l’adaptation de la société au vieillissement...qui est posée, et celle de la continuité des principes de solidarité et d’universalité. Nous ne devons pas ignorer les inégalités importantes qui existent en matière de soins palliatifs entre les territoires par exemple et l’inquiétude exprimée par les médecins et personnels de santé avec la mise en place des nouveaux Groupement Hospitaliers de Territoire, auxquels sont aussi rattachés les EHPAD. Il y a donc bien une question de moyens...
Par ailleurs, la mise en place d’une assistance médicalisée pour mourir ne s’oppose pas aux soins palliatifs ; ce sont en réalité deux composantes de la fin de vie, elles ne sont pas alternatives mais complémentaires, de mon point de vue ; or je pense vraiment et je l’ai défendu pendant les débats, que même dans un monde parfait où les soins palliatifs seraient pleinement déployés, il faut faire droit à la demande de celles et ceux qui, en fin de vie, souhaitent choisir le moment de leur mort. Car je ne le répèterai jamais assez, il ne s’agit pas d’une obligation mais bien d’un droit accordé à celles et ceux qui en feraient la demande...

S’agissant de la loi Claeys-Leonetti, mon groupe était particulièrement attaché à ce que les décisions prises le soient par le patient ou, s’il est incapable de s’exprimer, après une procédure collégiale qui inclue la personne de confiance désignée par le malade. Le texte de loi a finalement écarté l’idée d’une personne de confiance suppléante que nous avions proposée, ce qui est regrettable.
La loi du 2 février 2016 est particulièrement intéressante en ce qu’elle doit faciliter la mise en place de directives anticipées. Celles-ci sont prévues depuis 2005 mais elles n’ont été rédigées que par 2 ou 3 % de la population. Jusqu’en février 2016, c’est essentiellement votre association, l’ADMD, qui faisait la promotion des directives et qui en assurait la conservation.
La loi a confié à la Haute Autorité de Santé le soin d’élaborer un modèle pour les directives, ce qui me parait utile car il est sans doute difficile d’écrire soi-même ces instructions... Une campagne de communication doit être mise en place pour diffuser cette information. Le Sénat a cependant insisté pour que les directives puissent être rédigées librement, ce qui signifie qu’on ne peut pas les écarter sous prétexte qu’elles ne seraient pas conformes au modèle de la HAS. Ainsi, là encore, le choix est laissé aux personnes : on suit le modèle de la HAS ou bien on rédige ses propres directives...

J’aurais cependant souhaité qu’elles soient pleinement opposables, mais tel n’est pas ce que prévoient la loi et les décrets d’application. Si les directives sont « jugées par le médecin manifestement inappropriées ou non conformes à la situation médicale du patient », il peut s’en écarter « à l’issue d’une procédure collégiale ». Mais cette procédure collégiale n’est que consultative.
Il n’y a pas de décision collégiale, contrairement à ce qu’avec mon groupe, j’avais souhaité. C’est toujours le médecin qui décide à la fin et, même si cette situation a pu paraître adaptée à certains de mes collègues, je pense que cela n’est pas pleinement respectueux de la volonté de personnes en fin de vie.
Nous avons donc un progrès un peu en demi-teinte. D’une part, ce texte ne traite pas de la question de fond du droit à une assistance médicalisée pour mourir ; d’autre part, les directives anticipées ne sont pas pleinement opposables.
Cependant, la liberté de choix du patient est mieux reconnue, y compris pour la mise en place des soins palliatifs après l’arrêt des traitements, et la place des directives anticipées est renforcée.
Je pense qu’il nous appartient, individuellement et au travers des associations, de nous saisir des possibilités données par cette loi pour obtenir que plus de directives anticipées soient écrites par une part significative de la population. Ceci amènera nécessairement à leur conférer une place plus contraignante qu’elle ne l’est aujourd’hui.
Plus largement, les débats préparatoires à cette loi ont montré qu’au sein de la population, il y a une véritable demande de garanties sur la manière dont sera prise en charge la fin de vie. Les soins palliatifs sont une première garantie, mais il ne faut pas qu’ils deviennent une euthanasie qui n’ose pas dire son nom faute d’assumer la mise en place d’une assistance médicalisée pour mourir.
Je crois que, comme le développe Michel Vovelle, historien ayant réalisé des travaux d’histoire sociale et religieuse sur la mort, "la libre disposition de son droit à la vie implique le droit d’y mettre fin lorsqu’elle est devenue insupportable"...
Ce débat est encore devant nous...
Merci de votre écoute.

à Fontaine le 22 septembre 2016

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