Affaires économiques

Avant d’être débattu et voté en séance publique, chaque projet ou proposition de loi est examiné par l’une des sept commissions permanentes du Sénat : lois, finances, affaires économiques, affaires étrangères et Défense, affaires culturelles, affaires sociales, aménagement du territoire et du développement durable. Classées par commissions, retrouvez ici les interventions générales et les explications de vote des sénateurs CRC.

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Un correctif social plus qu’une véritable politique publique

Solidarité dans l’alimentation en eau -

Par / 11 février 2010

Le droit d’accès à l’eau est l’un des défis majeurs du XXIe siècle, un enjeu de civilisation. Son affirmation, à l’article premier de la loi sur l’eau et les milieux aquatiques, est hélas restée purement déclaratoire : l’eau représente aujourd’hui jusqu’à 14 % des ressources d’un foyer.

Ce texte permet-il de garantir le droit à l’eau ? Non ! D’abord parce que les dispositifs optionnels ont fait depuis longtemps la preuve de leur inefficacité. Ensuite, vous ne vous attaquez pas aux véritables causes de dysfonctionnement de ce service public. Soit, la commission est revenue sur la proposition initiale de M. Cambon qui confiait généreusement aux collectivités la responsabilité du financement des impayés d’eau. Quand les compétences et l’autonomie financière des collectivités ont été récemment réduites, celle-ci aurait abouti à socialiser les pertes et à privatiser les profits. Mais réintégrer ce dispositif au sein du Fonds solidarité logement ne suffit pas. Pour exemple, la réintégration des logements collectifs dans le FSL-eau dépendra du seul bon vouloir des départements.

L’appel à la générosité des délégataires avec le principe de la contribution facultative au FSL, déjà prévu à l’article 6-3 de la loi de 1990, n’a pas connu un franc succès : leur contribution est seulement de 3 millions via l’abandon de créances quand la facturation d’eau s’élève à 11 milliards. Faire croire que ce texte innove tient de la malhonnêteté intellectuelle ! Renforcer la contribution des entreprises est pourtant une nécessité en ces temps de désengagement de l’État.

Depuis 2004, la gestion et le financement des FSL ont été transférés aux départements, mais sans les moyens correspondants : en 2008, la compensation était de 93 millions quand le financement des aides représente 220 millions.

D’où la limitation des aides à 72 000 foyers. En plafonnant la contribution des opérateurs à 0,5 % des recettes provenant du service de l’eau, ce texte fait preuve d’un manque d’exigence envers les opérateurs, sans compter qu’il laisse perdurer le schéma actuel : une tarification trop importante de l’eau pour les usagers, une explosion des bénéfices pour les entreprises délégataires.

Le système proposé, en se voulant uniquement préventif dans le cadre du FSL, accepte de fait les inégalités d’accès au service public de l’eau et s’apparente finalement, faute de moyens et d’ambition, plus à un correctif social qu’à la mise en oeuvre d’une véritable politique publique. Certes, des dispositifs d’urgence sont nécessaires, compte tenu, notamment, de la situation sociale, mais la priorité est bien une politique publique différente dans ce secteur.

Les dérives constatées sur la tarification de l’eau montrent l’absurdité qu’il y a à considérer ce « patrimoine commun de la Nation » comme une simple marchandise et c’est pourquoi notre groupe avait défendu, lors de la discussion de la loi sur l’eau, que l’accès pour tous à cette ressource était un droit fondamental.

Nous prônons le retour progressif à une gestion intégralement publique de la distribution de l’eau afin que celle-ci réponde à l’intérêt général et que les bénéfices soient affectés exclusivement à l’amélioration de ce service public. Pour franchir un premier pas dans cette direction, nous avons déposé une proposition de loi alliant la définition du droit d’accès à l’eau et la mise en place d’une allocation de solidarité, tout en respectant le principe de péréquation nationale.

Malgré vos propos sur l’intérêt de notre dispositif, vous n’avez pas voulu en débattre aujourd’hui en déclarant nos amendements irrecevables et en renvoyant cette question à de futurs débats à l’Assemblée nationale. Nous surveillerons de près ces débats... Pourtant, légiférer uniquement sur le volet curatif ne répondra pas à l’objectif de la Lema de donner « un droit d’accès de tous à l’eau dans des conditions économiquement acceptables ». C’est pourquoi mon groupe ne votera pas, aujourd’hui, un dispositif incomplet et redondant avec la législation actuelle sans avoir pu débattre de l’instauration d’un volet préventif.

Je voudrais saluer le travail de l’Observatoire des usagers de l’assainissement d’Ile-de-France et -et c’est assez rare pour le souligner- dire à notre collègue Cambon combien nous avons été sensibles au dépôt de sa proposition de loi qui a le mérite de poser la question de la solidarité dans le domaine de l’accès à l’eau.

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Bio Express

Éliane Assassi

Sénatrice de Seine-Saint-Denis - Présidente du groupe CRCE
Membre de la commission des Lois
Elue le 26 septembre 2004
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