Lois

Avant d’être débattu et voté en séance publique, chaque projet ou proposition de loi est examiné par l’une des sept commissions permanentes du Sénat : lois, finances, affaires économiques, affaires étrangères et Défense, affaires culturelles, affaires sociales, aménagement du territoire et du développement durable. Classées par commissions, retrouvez ici les interventions générales et les explications de vote des sénateurs CRC.

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Nous refusons cette concentration des pouvoirs locaux dans les régions et les intercommunalités, au détriment des départements

Election des conseillers départementaux et des conseillers municipaux (nouvelle lecture) -

Par / 15 avril 2013

Comme cela était prévisible, la commission mixte paritaire a échoué ; nous examinons donc le texte en troisième lecture.

Monsieur le ministre, il faut vous reconnaître un trait de caractère : l’obstination. En politique, c’est une qualité quand elle est mise au service de la recherche de l’intérêt général et du progrès pour tous.

M. Manuel Valls, ministre. Merci !

Mme Éliane Assassi. Mais, en l’occurrence, il me semble que vous persistez dans l’erreur ! Le Sénat a rejeté deux fois votre proposition de mode de scrutin binominal pour les futurs conseillers départementaux ; nous allons voir s’il confirme sa position.

Vous avez beau soutenir que ce mode de scrutin serait la seule solution, nous sommes têtus – certains diraient « cohérents » – et nous persistons à affirmer qu’il existe d’autres possibilités. Le dispositif que vous envisagez ne permettra ni la proximité ni la juste représentation des différents courants de pensée qui font vivre notre République.

On peut, certes, saluer votre volonté de faire franchir un pas décisif à la parité dans les assemblées départementales ; je trouve que je vous fais beaucoup d’éloges aujourd’hui, monsieur le ministre. (Sourires.) Vous savez combien nous sommes, comme d’autres, attachés à un tel objectif. Seulement, s’il est vrai que ces assemblées ont bien besoin de parité, cela ne saurait constituer un prétexte pour enterrer le pluralisme, objectif constitutionnel tout aussi important à nos yeux.

Comme je l’ai déjà indiqué à cette tribune, pour nous, le binôme républicain, c’est à la fois la parité et le pluralisme. Nous avons émis des propositions précises en ce sens ; elles auraient mérité un débat un peu plus approfondi.

Ainsi, nous avions déposé un amendement tendant à instituer un scrutin de liste départemental ; un autre visait à introduire une part de proportionnelle pour rééquilibrer le mode de scrutin majoritaire par canton. Lors de la deuxième lecture du projet de loi, nous vous avons même proposé d’adjoindre ce mode de scrutin à votre système binominal, ce qui aurait permis de concilier l’approche territorialisée du scrutin, la parité et la représentativité.

Malheureusement, vous êtes resté sourd à toutes nos propositions, comme d’ailleurs à celles d’autres forces politiques qui, pourtant, vous soutiennent. Vous êtes resté enfermé dans votre certitude de l’absence d’autre possibilité. Pourtant, vous savez pertinemment que votre proposition est, pour le moins, incomprise par une large majorité de nos concitoyens et rejetée par les élus locaux dans toute leur diversité.

Nous vous appelons donc une dernière fois à entendre les critiques que votre réforme suscite. Vous le savez, notre pays traverse une grave crise, à la fois morale et politique. En plus de soulever des questions liées à l’argent, elle met de plus en plus en lumière le décalage entre les institutions de la Ve République et les aspirations citoyennes à plus de démocratie, de pluralisme et de contrôle par le peuple de l’action publique. Aujourd’hui, nos concitoyens sentent de plus en plus le fossé se creuser entre eux et leurs élus. Ils ont le sentiment de ne pas être réellement représentés et écoutés dans les instances démocratiques de notre République. La perte de confiance s’installe.

Avec un tel projet de loi, vous ne répondez pas aux attentes que la crise manifeste. Au contraire. En effet, en proposant un mode de scrutin qui instituera le bipartisme dans les départements, vous créez les conditions de la non-représentativité de leurs assemblées, ce qui aura pour conséquence une faible mobilisation citoyenne lors des élections. Ce faisant, vous éloignerez les départements des attentes de la population.

D’ailleurs, n’est-ce pas l’objectif recherché : préparer la disparition des départements ? C’est ce que prévoit le Gouvernement dans les projets de loi dits « de décentralisation », qui sont en fait des projets de concentration des pouvoirs locaux aux niveaux régional et intercommunal, au détriment des communes et des départements.

Le présent projet de loi constitue un premier pas vers cet objectif inavoué. Son article 2 prévoit de concentrer deux élections en une. Avec l’article 20, le Gouvernement instaure l’élection au suffrage universel direct des conseillers communautaires, afin de permettre aux intercommunalités de devenir des collectivités territoriales de plein exercice, appelées à remplacer les communes et à faire disparaître les départements.

Pour notre part, nous ne saurions soutenir une première étape vers une telle concentration des pouvoirs. Certes, nous sommes les seuls dans cette assemblée à refuser cette perspective. Pourtant, nous venons tous d’adopter un projet de résolution affirmant notre attachement aux communes. C’est la preuve que, derrière les proclamations d’intentions, se cache un double langage !

Seuls ici, nous ne sommes pas pour autant isolés. Nous savons qu’une large majorité d’élus locaux nous soutiennent. Voyez le vote de nos concitoyens en Alsace contre la disparition de leurs départements au profit d’un monstre bureaucratique !

M. André Reichardt. C’est un drame ! Une décision très grave !

Mme Éliane Assassi. Ce qui est très grave, monsieur Reichardt, c’est d’avoir présenté un tel projet. Et quand, de surcroît, il n’y a pas de débat démocratique, c’est encore plus grave !

Souvenez-vous aussi du vote des Corses, qui ont fait le même choix voilà quelques années.

C’est d’ailleurs sans doute afin d’éviter la sanction populaire que, pour faire disparaître le département du Rhône et les communes de la communauté urbaine de Lyon, vous choisissez la loi plutôt que le référendum. C’est dire si vous craignez l’expression de la souveraineté populaire contre de tels projets de concentration des pouvoirs et d’éloignement des lieux de décision !

Pour toutes ces raisons, comme en deuxième lecture, nous ne pourrons que voter contre ce projet de loi.

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