Les questions d’actualité

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Après plus de deux mois de frappes aériennes, la France est entrainée dans l’engrenage de la guerre civile

Engagement de la France en Libye -

26 mai 2011
Après plus de deux mois de frappes aériennes, la France est entrainée dans l’engrenage de la guerre civile
Après plus de deux mois de frappes aériennes, la France est entrainée dans l’engrenage de la guerre civile

Ma question s’adresse à M. le Premier ministre.

L’envoi prochain d’hélicoptères français de combat en Libye pour réaliser des frappes au sol plus précises est le signe de l’évolution inquiétante et incertaine de la situation dans ce pays.

Bien que vous prétendiez qu’il ne s’agit pas d’un changement de stratégie, cette décision marque une intensification de notre intervention militaire et un changement significatif de la politique que poursuit votre gouvernement dans ce conflit.

Aujourd’hui, le cadre et les objectifs de protection des populations civiles fixés par la résolution 1973 de l’ONU semblent largement dépassés par la tournure que prennent les événements. Le blocage de la situation sur les plans militaire et politique est total.

Le départ du dirigeant libyen, sinon son élimination, est de plus en plus ouvertement évoqué comme but de guerre.

Après plus de deux mois de frappes aériennes, la France est entraînée dans l’engrenage de la guerre civile, avec un statut de cobelligérant auprès des insurgés, et aucune solution politique négociée n’est en vue.

En revanche, la catastrophe humanitaire ne cesse de s’amplifier. En plus des morts et des blessés, selon le Haut commissariat des Nations unies pour les réfugiés, plus de 740 000 personnes ont quitté la Libye dans les deux derniers mois pour se réfugier dans les pays voisins, notamment la Tunisie, dans des conditions sanitaires particulièrement difficiles. Seulement 2 % de ces réfugiés sont accueillis en Europe.

La situation actuelle nécessite donc d’aboutir très rapidement à un cessez-le-feu en appuyant les efforts diplomatiques en cours. Elle nécessite également que la France et l’Union européenne acceptent d’accueillir un nombre plus important de réfugiés pour soulager les pays de la région.

La situation en Libye est l’un des sujets abordés aujourd’hui à Deauville au sommet des pays du G8.

Monsieur le Premier ministre, je réitère donc la demande de notre groupe tendant à ce que soit organisé, avant la fin de la session, un débat parlementaire permettant de soumettre à l’accord du Parlement la prolongation de notre engagement militaire, comme le prévoit l’article 35 de la Constitution ou, à défaut, par application de son article 50-1.

Dans l’immédiat, je vous demande de me préciser les initiatives que compte prendre notre pays pour trouver une solution politique à ce conflit et sortir ainsi de l’impasse dans laquelle nous semblons nous engager. (Très bien ! et applaudissements sur les travées du groupe CRC-SPG et du groupe socialiste.)

M. le président. La parole est à M. le Premier ministre.

M. François Fillon, Premier ministre. Monsieur le sénateur, que serait la situation humanitaire en Libye si les forces de M. Kadhafi étaient rentrées dans Benghazi, si la ville de Misrata était tombée ?

On peut donner des leçons,…

M. Alain Gournac. Pour cela, ils sont très forts !

M. François Fillon, Premier ministre. … on peut souhaiter qu’un cessez-le-feu intervienne en se lavant les mains de la réalité de la situation sur le terrain.

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. On n’en sait rien !

M. Paul Raoult. Ce ne serait pas pire qu’aujourd’hui !

M. François Fillon, Premier ministre. En vérité, si la France n’avait pas pris cette initiative,…

M. René-Pierre Signé. Elle a mis longtemps !

M. François Fillon, Premier ministre. … à l’heure qu’il est, les forces du colonel Kadhafi auraient pris le contrôle de l’ensemble du pays et la révolution aurait été étouffée dans l’œuf.

Aujourd’hui, nous respectons strictement les termes de la résolution des Nations unies.

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. On n’en est plus à l’application de la résolution des Nations unies !

M. François Fillon, Premier ministre. Nous utilisons les forces de la coalition pour empêcher les troupes du colonel Kadhafi de reprendre du terrain sur les insurgés.

M. René-Pierre Signé. Il y a eu des morts !

M. François Fillon, Premier ministre. Si nous avons indiqué qu’il était possible que nous engagions des hélicoptères de combat, c’est pour relâcher la pression sur Misrata. En effet, les forces du colonel Kadhafi, vous le savez, ont à plusieurs reprises essayé de prendre cette ville en l’encerclant et il est très difficile pour les avions de la coalition de frapper ses troupes parce qu’elles sont mêlées aux populations. C’est la raison pour laquelle nous serons peut-être amenés à utiliser des hélicoptères français de combat et des hélicoptères d’autres pays de la coalition : pour empêcher les troupes du colonel Kadhafi de prendre Misrata et d’accroître leur pression sur les insurgés.

En même temps, la France multiplie les initiatives diplomatiques, au côté de la Grande-Bretagne, notamment, pour essayer de trouver le plus vite possible une solution politique à ce conflit.

C’est ainsi que nous avons été à l’initiative de la mise en place d’un groupe de contact réunissant l’ensemble des pays de la coalition, y compris un certain nombre de pays arabes. Nous avons multiplié les contacts avec les forces politiques présentes sur le territoire même de la Libye pour essayer d’obtenir que se noue un dialogue entre les autorités…

M. Jacques Mahéas. Cela n’avance pas !

M. François Fillon, Premier ministre. Vous voulez peut-être vous en occuper ? Cela avancerait plus vite ? (Exclamations sur les travées du groupe socialiste.)

M. Didier Boulaud. Nous serons peut-être obligés de nous en occuper dans un an, quand vous ne serez plus là !

M. François Fillon, Premier ministre. Nous essayons de en sorte de protéger des hommes et des femmes qui se battent pour leur liberté. Vous pourriez, me semble-t-il, avoir un peu plus de respect pour le combat qui est mené ! (Applaudissements sur les travées de l’UMP et de l’Union centriste.)

En tout cas, s’agissant du Parlement, je vous indique que, grâce à la révision constitutionnelle que vous n’avez pas votée, il y aura, bien entendu, le moment venu, à la date prévue, un débat sur l’autorisation donnée au Gouvernement français d’engager nos forces en Libye. (Applaudissements sur les travées de l’UMP et de l’Union centriste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)

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