dossier Covid-19 : les politiques libérales en accusation

Peut-on lutter efficacement contre la pandémie de covid-19 avec des méthodes fidèles aux dogmes libéraux, alors que ceux-ci ont précisément conduit à méconnaître la crise puis à l’aggraver, notamment en affaiblissant la recherche et le service public hospitalier ? Pour le gouvernement, la réponse est oui, comme en témoignent sa gestion de la crise et plus particulièrement les dispositions de la loi de finances rectificative et les mesures de l’état d’urgence sanitaire, entré lui en vigueur le 24 mars, qu’il a fait adopter par le Parlement. Pour les membres du groupe CRCE, la réponse est en revanche négative. Ils se sont donc abstenus lors du vote de cette loi de finances rectificative et se sont prononcés contre les mesures d’urgence proposées par Emmanuel Macron : pleins pouvoirs au gouvernement pendant deux mois, sans contrôle ou presque ni vote du Parlement ; dérogations injustifiées au droit du travail en matière de congés, de repos hebdomadaires et dominicaux ; mais refus de mettre à contribution les ménages les plus riches et les actionnaires.

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Nos propositions de loi et de résolution

Retrouvez ici l’ensemble des propositions de loi déposées par le groupe CRC.

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Rendons gratuit l’accès aux masques et aux tests

Covid-19 -

22 septembre 2020

La pandémie de SARS-CoV-2 (ou Covid-19) apparue en décembre 2019 n’est pas terminée, le nombre de contaminations et d’hospitalisations repartent même à la hausse dans notre pays montrant que l’incertitude et l’inquiétude demeurent.

Si la France a connu une première phase qui a démontré un manque de préparation des autorités sanitaires, il semble que la pénurie de masques, de blouses, de gants, de gel hydro-alcoolique, de bouteilles d’oxygène, de respirateurs en réanimation, de tests de dépistage, de médicaments ne soit plus d’actualité.

Désormais notre pays se serait doté des outils indispensables pour répondre à la pandémie et pour protéger l’ensemble de la population. Toutefois, le Gouvernement ne semble pas avoir tiré les leçons du premier pic de la pandémie et tarde à réagir.

Le confinement avait démarré au mois de mars par le scandale de la pénurie demasques, y compris pour les personnels soignants, et des atermoiements concernant leur « inutilité ». Désormais, cet outil nécessaire à la prévention des contaminations par la Covid 19 serait disponible en nombre.

Alors que dès le mois de janvier, l’Organisation mondiale de la santé (OMS) a préconisé aux États de mettre en place le dépistage et le port de masque, le Gouvernement français refuse toujours de rendre ces deux mesures de protection accessibles à toutes et tous.

L’Académie nationale de médecine dans un communiqué publié le 2 avril a pourtant confirmé la préconisation : « il est établi que des personnes en période d’incubation ou en état de portage asymptomatique
excrètent le virus et entretiennent la transmission de l’infection. En France, dans ce contexte, le port généralisé d’un masque par la population constituerait une addition logique aux mesures barrières actuellement en vigueur ».

À son tour, le Haut Conseil de la santé publique (HCSP), dans un avis diffusé le 24 avril, a demandé « de rendre obligatoire le port d’un masque grand public dans les établissements recevant du public, dès lors que la distance physique d’au moins 1 mètre ne peut être garantie ou s’il y a un doute sur la possibilité de l’organiser et la respecter ».

C’est dans son plan de déconfinement que le Gouvernement s’est résolu à rendre obligatoire le masque et à généraliser les tests avec le triptyque « protéger, tester, isoler ».

Le masque est devenu obligatoire quasiment partout en France
Pour freiner la propagation ducoronavirus, casser la chaîne de transmission et limiter le rebond épidémique,le port du masque est désormais obligatoire quasiment partout en France.

Depuis le 11 mai, il l’est dans les transports publics (train, bus, tramways, métro, RER...) et en gares, pour tous les usagers de 11 ans et plus, ainsi que pour le personnel mais aussi dans les avions de certaines compagnies comme Air France.

Depuis le lundi 20 juillet, porter un masque était obligatoire dans tous les lieux publics clos, dès lors que les règles de distanciation physique ne pouvaient être garanties, et les préfets pouvaient décider de le rendre obligatoire dans la rue.
Le 27 août, le Premier ministre a annoncé que désormais : « le port du masque est obligatoire dans tous les espaces fermés où il y a plus d’une personne ». Cela concerne aussi bien les restaurants et débits de boissons, les salles de réunions, de spectacles et les cinémas, que les hôtels, les salles de jeux, les centres de vacances, les centres de loisirs, ou encore les bibliothèques, et les administrations.

Depuis le 28 août, le port du masque est également obligatoire dans certaines villes, comme Paris et les trois départements limitrophes, Toulon, Montpellier, Lyon, Nantes, Bordeaux, Biarritz, Perpignan, Creil, Argelès, l’Île-de-Ré, Belfort, Saint-Étienne...

À partir du 1er septembre, le masque devient obligatoire au travail, qu’il s’agisse de la fonction publique ou privée, et que ce soit dans les open-space, les salles de réunion, les couloirs de circulation, les espaces café ou cafétérias...

Enfin, à partir de cette même date, le masque devient également obligatoire dansles écoles pour tous les élèves à partir de 11 ans (c’est-à-dire, les collégien· nes et les lycéen· nes) et les adultes (enseignant·es, personnels des établissements scolaires dès l’école maternelle...) lorsqu’ils sont dans un lieu clos (salles de classe, couloirs...) et ce, même quand la distanciation d’un mètre peut être respectée, a indiqué le ministre de l’Éducation nationale.

Dans un tel contexte, l’obligation de porter un masque n’impacte pas tous les Français et toutes les Françaises de la même façon. La crise économique, qui s’ajoute à la crise sanitaire, ne les affecte pas à égalité. Elle prive d’emploi ou place en chômage partiel plus de 12 millions de personnes depuis la mi-mars.
Malgré les soutiens de l’État, 31 % des Françaises et des Français déclarent que leurs revenus personnels en sortent amoindris, selon une enquête de l’Institut Kantar, réalisée mi-avril. Or, avant même l’irruption de la Covid-19 dans leur quotidien, un tiers des ménages connaissait déjà des difficultés financières importantes, les mettant parfois dans des situations de précarité.

Si le Gouvernement a bien plafonné le prix de vente des masques chirurgicaux dans la grande distribution, ce prix, selon des enquêtes conduites par les associations de consommateurs, a déjà été multiplié par 6 ou 7 depuis le 15 mars dernier dans les autres circuits de vente.

Une boîte de 50 masques chirurgicaux qui coûtait entre 6 et 7 € avant la crise sanitaire, pouvait coûter jusqu’à 40 € en plein pic de la pandémie.

Aujourd’hui encore, malgré une baisse, le prix demeure 4 fois supérieur au prix pratiqué avant l’apparition de la Covid-19.

Pour un couple avec deux enfants allant au lycée ou au collège, l’achat des masques pour toute la famille et pour une durée d’un mois représente une somme de 200 €.

Seuls ceux qui ont une pathologie grave ont le droit à une prescription médicale et peuvent se faire rembourser l’achat de masque par la sécurité sociale.

Mais pour les autres, pour des millions de foyers, il n’est pas envisageable de consacrer entre 30 et 50 € mensuels par personne pour se procurer des masques chirurgicaux en nombre suffisant.

D’autant que pour être efficaces, ceux-ci doivent être changés toutes les quatre heures.

Quant aux masques en tissu, dont le prix varie entre deux et sept euros, ils ne sont lavables qu’un certain nombre de fois.

Plusieurs avis rendus par le Président du Conseil scientifique, Jean-François Delfraissy, suggèrent la gratuité des masques mais également des tests pour les plus fragiles et les plus précaires. Les dépistages sont complémentaires des masques pour réduire la pandémie. Les retards pris par la France en la matière nécessitent d’être comblés ce qui pose également la question du coût et du remboursement.

Actuellement, il faut distinguer deux types de tests : les tests virologiques réalisés dans les laboratoires et les tests sérologiques réalisés dans les pharmacies.

Les tests virologiques coûtent 54 € pour les assuré·es sociaux intégralement remboursés par l’Assurance maladie avec la possibilité dans certains laboratoires de ne pas faire l’avance des frais.

Les tests sérologiques qui détectent l’immunité et les anticorps coûtent 12 à 15 € pour les tests Elisa et 9,45 € pour les tests rapides. Ces tests sont remboursés intégralement uniquement sur ordonnances.

Enfin depuis le 11 juillet les pharmacies peuvent elles aussi réaliser des tests sérologiques rapides. Il en coûte entre 15 € et 25 € et ils ne sont pas remboursés.

Des initiatives ont été lancées dans beaucoup de communes et de départements pour pallier ces difficultés. Pourtant, ce n’est pas aux collectivités de prendre en charge un tel enjeu de santé publique.

Le Premier ministre refuse de rembourser l’ensemble des masques même pour les jeunes et considère suffisant le remboursement des masques « pour les personnes vulnérables parce qu’elles sont âgées ou malades et pour les personnes pauvres éligibles à la couverture maladie universelle (CMU) ».
L’envoi de 40 millions de masques lavables à 7 millions de Françaises et Français en dessous du seuil de pauvreté est indispensable mais insuffisant.

En cette rentrée, des millions de familles, sans distinction, vont devoir débourser des dizaines d’euros par mois pour assurer leur santé et celle des autres, écornant une fois de plus les principes égalitaires de l’école publique.
Renvoyant les familles à leur propre responsabilité, le Gouvernement culpabilise les personnes qui vont devoir s’acquitter d’une dépense supplémentaire qui s’ajoute aux nombreux frais entraînés par la crise sanitaire.
Ainsi, seuls les élèves et étudiants boursiers bénéficieront de la gratuité des masques alors que nombre d’entre elles et eux doivent déjà se salarier pour financer leurs études.

Le débat sur la gratuité des masques pour toutes et tous ou uniquement pour les plus précaires et les plus fragiles est révélateur de deux conceptions différentes du modèle social.

D’un côté, une vision universelle demandant l’accès gratuit pour toutes et tous aux masques, fidèle aux principes fondateurs de la Sécurité sociale.
De l’autre, l’action ciblée sur les « publics précaires et fragiles » du Gouvernement ou sur les jeunes pour Les Républicains, qui envisage la politique d’aide sociale a minima et caritative.

Alors que l’école est laïque, publique, gratuite et obligatoire, le masque devrait l’être également. Sans masque, un élève ne pourra se rendre ni assister aux enseignements créant de fait une inégalité d’accès au savoir selon la situation sociale des familles.

Au nom du principe d’égalité, l’ensemble des élèves devraient pouvoir se rendre à l’école et disposer d’un masque gratuitement.

À considérer que le masque serait une fourniture scolaire comme une autre, le risque est grand de banaliser cet objet de protection et au bout du compte de renforcer les inégalités sociales de prévention et de santé.

Le port du masque est une mesure de santé publique et le Gouvernement devrait envisager une prise en charge, sans distinction sociale.

Face à l’inaction de l’État, les élu·es des collectivités territoriales, avec au premier rang les maires, se sont engagées dans l’achat de masques pour protéger leur population. En faisant l’acquisition de ces masques, les collectivités ont compensé une nouvelle fois des missions étatiques non remplies.

En retour, le Gouvernement a décidé de prendre en charge uniquement « les « commandes passées entre le 13 avril et le 1er juin et dans la limite d’un prix de référence fixé à 0,84 € pour un masque jetable et de 2 € pour un masque en tissu », soit en remboursement inférieur au prix encadré des masques de 0,95 € et excluant les commandes antérieures au 13 avril.

Les collectivités qui ont été plus réactives que le Gouvernement pour répondre aux besoins de leurs administré·es afin de leur assurer une protection le plus rapidement possible se retrouvent ainsi injustement sanctionnées.
Cette situation cynique envers les élu·es locaux qui œuvrent au quotidien pour trouver des solutions collectives contre cette pandémie est un mépris supplémentaire à leur égard et pour les territoires qu’ils représentent.

La santé de nos concitoyennes et concitoyens ne doit pas dépendre de leur pouvoir d’achat. C’est la raison pour laquelle nous invitons le Gouvernement à prendre la décision de rendre accessibles les masques à toute la population, au même titre qu’il le fait pour l’accès aux soins et aux médicaments.
Le masque est un instrument de santé publique.

Nous invitons le Gouvernement à engager une réflexion sur la prise en charge des masques à 100 % par la sécurité sociale, pour chacune et chacun de ses assurés.

Cela existe déjà pour des matériels et dispositifs médicaux pris en charge à 100 % par la sécurité sociale, comme les appareillages de type béquilles, minerves, attelles, prothèses, et autres matériels de soins, pansements...
Cette dépense, évaluée à 200 millions d’euros par mois, pourrait être imputée, durant toute la durée de l’épidémie, au budget de la branche maladie.

Une telle décision contribuerait, selon la majorité des scientifiques, à un renforcement de la lutte contre la circulation de l’épidémie et par là même, au contrôle des dépenses de santé. La diminution du nombre de personnes infectées allégerait automatiquement la charge supportée par la sécurité sociale et serait source, au final, d’importantes économies.

En pratique, chaque assuré aurait droit à un certain nombre de masques grand public et chirurgicaux remboursés par mois, et cela jusqu’à la fin de la pandémie.

À défaut de carte vitale, la citoyenne ou le citoyen pourrait aller retirer auprès de sa caisse d’assurance maladie un bon physique lui ouvrant les mêmes droits, renouvelables chaque mois.

Protéger ainsi, de la façon la plus équitable possible, l’ensemble des Françaises et Français de l’hexagone et des Outre-mer grandirait notre Nation, dans le respect de nos valeurs républicaines.

Alors que les deux piliers de la prévention de la pandémie de Covid-19 s’articulent autour du port des masques et du dépistage régulier et rapide, ce dernier devrait également faire l’objet du même traitement que les masques.
Ainsi, les tests sérologiques pourraient être remboursés par l’Assurance maladie intégralement comme c’est le cas pour les tests virologiques.

D’un côté, les scientifiques recommandent le port du masque pour rompre la chaîne de circulation du virus et de l’autre, il est obligatoire dans de nombreuses situations, sous peine d’amende.

Si le port du masque n’est pas l’unique moyen de lutter contre la propagation du virus, il est donc reconnu comme un outil important et même nécessaire.
Ce constat étant posé, l’accès aux masques n’est pas aisé. L’offre n’est pas encore au niveau de la demande et le coût en reste élevé.

La présente résolution invite le Gouvernement à inciter de manière volontariste à la production des masques, afin de participer à l’effort de fabrication et de relocalisation pour répondre aux besoins tant humains qu’environnementaux.
Quelle belle ambition face à une telle pandémie : protéger tous ses citoyens et citoyennes et favoriser en même temps l’emploi en mobilisant ses forces productives !

Le Sénat a adopté une résolution le 1 juillet dernier tendant à la
création d’une commission d’enquête pour l’évaluation des politiques publiques face aux grandes pandémies à la lumière de la crise sanitaire de la Covid-19 et de sa gestion.

Dans la continuité de ses travaux et en complémentarité, nous proposons au Gouvernement d’assurer la gratuité des masques et des dépistages par une prise en charge à 100% des frais par l’Assurance maladie.

Proposition de résolution visant à rendre l’accès gratuit aux masques et aux tests

Le Sénat,

Vu l’alinéa 11 du Préambule de la Constitution de 1946,

Vu l’article 34-1 de la Constitution,

Vu les articles 1er à 6 de la loi organique n° 2009-403 du 15 avril 2009 relative à l’application des articles 34-1, 39 et 44 de la Constitution,

Vu le livre III du code de la sécurité sociale, notamment les titres Ier et II,

Vu le livre Ier du code de la santé publique, notamment le titre III,

Vu le décret n° 2020-506 du 2 mai 2020 complétant le décret n° 2020-293 du 23 mars 2020 prescrivant les mesures générales nécessaires pour faire face à l’épidémie de covid-19 dans le cadre de l’état d’urgence sanitaire,

Vu le décret n° 2020-860 du 10 juillet 2020 prescrivant les mesures générales nécessaires pour faire face à l’épidémie de covid-19 dans les territoires sortis de l’état d’urgence sanitaire et dans ceux où il a été prorogé,

Considérant les préconisations de l’Académie nationale de médecine et du Haut Conseil de la santé publique sur la généralisation du masque dans l’espace public comme instrument de santé publique pour lutter contre l’épidémie ;

Considérant l’obligation de porter un masque pour des raisons de santé publique dans les collèges, les lycées et les universités, dans les transports, dans les lieux clos, et dans les entreprises et dans l’espace public de nombreuses villes françaises ;

Considérant la forte demande et l’accès toujours difficile aux masques de protection ;

Considérant l’aggravation significative de la situation économique et sociale de nombreux foyers depuis le début de la crise ;

Considérant, pour un foyer modeste, le coût conséquent que représente l’achat régulier de masques de protection malgré l’encadrement des prix ;

Invite le Gouvernement à réfléchir à la prise en charge des masques de protection à toute la population et à mettre en place un dispositif de distribution coordonné par l’assurance maladie avec le réseau national de pharmacies ;

Invite le Gouvernement à engager une réflexion sur la participation de l’assurance maladie pour une prise en charge à 100 % des masques et des dépistages.

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