Nos propositions de loi et de résolution

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Les dérives du « plaider coupable »

Abrogation de la reconnaissance préalable de culpabilité -

Par / 23 mai 2012

La loi n° 2004-204 du 9 mars 2004 portant adaptation de la justice aux évolutions de la criminalité connaît depuis son adoption des revers. En effet, la plupart de ses dispositions ont considérablement favorisé le pouvoir exécutif par rapport au pouvoir judiciaire, tant par l’accroissement des prérogatives accordées aux forces de l’ordre que par l’effacement du juge du siège face au parquet. Deux dispositions se distinguent particulièrement en raison des déboires rencontrés depuis leur adoption : la procédure de comparution sur reconnaissance préalable de culpabilité et le délit de révélation d’informations issues d’une instruction.

La procédure de comparution sur reconnaissance préalable de culpabilité (CRPC) a fait l’objet de multiples critiques lors des débats parlementaires. D’une part, il lui était reproché de laisser de trop larges pouvoirs au procureur, un magistrat dont l’indépendance est aujourd’hui plus que jamais contestée. D’autre part, la place confiée à l’aveu, sollicité grâce à la menace d’une sanction pénale plus lourde, était dénoncée. Enfin, les droits reconnus au prévenu tout au long de cette procédure étaient considérés comme insuffisants.

Ces critiques, qui sont autant d’atteintes aux droits à un procès équitable, sont toujours d’actualité. Plus encore, le temps écoulé depuis la mise en place de cette procédure les a confirmés. Elles se concentrent pour beaucoup autour du rôle de l’avocat dans ce « plaider coupable », mais aussi sur la place que doit y prendre la victime.

Concernant le rôle de l’avocat, si l’article 495-8 alinéa 4 du code de procédure pénale semble être un rempart puisqu’il prévoit que la personne ne peut renoncer à son droit d’être assistée par un avocat, dans la pratique on se rend compte que celui-ci a souvent un rôle de faire-valoir et qu’il constitue littéralement un alibi, comme le dénoncent de nombreux membres de la profession.

Ceux-ci dénoncent notamment le rôle très inconfortable dans lequel ils se retrouvent, puisqu’ils ont très peu de temps pour décider d’un accord avec leurs clients et qu’il leur est parfois rappelé par les membres du parquet qu’ils prendront « toute responsabilité en cas de refus de la proposition émise ».

Sur la reconnaissance de culpabilité elle-même, selon l’article 495-7 du mode de procédure pénale, le procureur fait comparaître « les personnes qui reconnaissent les faits qui leur sont reprochés ». Mais la pratique démontre, là encore, que cette notion de « faits » pose problème, le client reconnaissant souvent un comportement et non une qualification correspondant à une infraction en bonne et due forme. On comprend alors l’intérêt d’un vrai procès où l’avocat va préparer le dossier et éventuellement obtenir une relaxe sur un comportement qui ne correspondrait en réalité pas à une qualification juridique pour laquelle est poursuivi son client.

Une autre critique majeure révélée par la pratique, est la place accordée à la victime qui compte souvent sur un véritable procès pour faire le deuil du préjudice subi à la suite de l’infraction concernée.

Celle-ci ne participe pas à la première phase de la CRPC, sauf s’il est fait usage de l’article 495-15, à savoir la convocation à l’initiative de l’intéressé, hypothèse en réalité inexistante.

Dans tous les cas, la procédure est rapide et la partie civile se trouve souvent dans l’obligation de citer ultérieurement l’auteur des faits devant le tribunal correctionnel pour faire valoir ses droits.

Ainsi, les critiques vivement dénoncés par le groupe des sénateurs communistes républicains et citoyens lors de l’examen du projet de loi, ont largement été confirmés par la pratique. Dans ces circonstances, il convient de supprimer une telle procédure (article 1er).

La loi du 9 mars 2004 recèle une autre disposition controversée, qui concerne le respect des droits de la défense. L’article 434-7-2 du code pénal, modifié par la loi n° 2005-1549 du 12 décembre 2005 relative au traitement de la récidive des infractions, prévoit en effet que « sans préjudice des droits de la défense, le fait, pour toute personne qui, du fait de ses fonctions, a connaissance, en application des dispositions du code de procédure pénale, d’informations issues d’une enquête ou d’une instruction en cours concernant un crime ou un délit, de révéler sciemment ces informations à des personnes qu’elle sait susceptibles d’être impliquées comme auteurs, coauteurs, complices ou receleurs, dans la commission de ces infractions, lorsque cette révélation est réalisée dans le dessein d’entraver le déroulement des investigations ou la manifestation de la vérité, est punie de deux ans d’emprisonnement et de 30 000 euros d’amende ».

Sous couvert de lutter contre la criminalité organisée, cette disposition porte une atteinte excessive et injustifiée aux droits de la défense. En effet, les effets cumulés du secret de l’instruction et du secret professionnel sont suffisamment contraignants pour les avocats afin que des éléments de l’instruction ne soient pas divulgués.

La Commission nationale consultative des droits de l’homme avait elle aussi souligné, dans son avis du 27 mars 2003, le danger que représentait ce nouvel article 434-7-2 du code de procédure pénale. La formulation floue et le très vaste champ d’application de cette nouvelle incrimination - toute personne qui, du fait de ses fonctions, a connaissance, en application des dispositions du code de procédure pénale, d’informations issues d’une enquête ou d’une instruction en cours concernant un crime ou un délit est ainsi concernée - font peser selon elle une menace inacceptable manifestement incompatible avec le libre exercice des droits de la défense.

Il convient donc d’abroger l’article 434-7-2 du code de procédure pénale (article 2).

Tels sont les motifs de la proposition de loi que nous vous demandons de bien vouloir adopter.

PROPOSITION DE LOI

Article 1er

La section 8 du chapitre Ier du titre II du livre II du code de procédure pénale est abrogée.

Article 2

L’article 434-7-2 du code pénal est abrogé.

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