A son tour, le Sénat marche sur les droits des étrangers et des demandeurs d’asile

Hier, en commission des lois au Sénat, plusieurs amendements du rapporteur, François-Noël Buffet, et de la droite sénatoriale ont été adoptés, venant aggraver le projet de loi « Asile et immigration ». Quelques minces dispositions positives du texte du gouvernement ont été supprimées : le titre pluriannuel pour les bénéficiaires de la protection subsidiaire et apatrides, la facilitation du regroupement entre frères et sœurs mineurs par exemple.

Quelques avancées apportées à l’Assemblée nationale ont également été balayées, notamment sur le sort des « Dublinés », rétablissant le recours contre une décision de transfert à 7 jours (contre 15) et la possibilité de placer en rétention ceux ayant refusé de donner leurs empreintes. De la même manière a été supprimé l’assouplissement du « délit de solidarité », faisant de celles et ceux qui aident courageusement les exilés, des délinquants.

Des mesures répressives viennent durcir encore un peu plus notre politique migratoire : délai de départ volontaire ramené de 30 à 7 jours, durée maximum d’interdiction de territoire français portée de 3 à 5 ans, expulsions facilitées des déboutés des centres d’hébergement, aide médicale d’État transformée en aide d’urgence…

Mais ne nous méprenons pas, le gouvernement aura beau jeu de se défausser sur la droite sénatoriale et les « reculs » qu’elle porte face à un texte déjà dénoncé de toutes parts dans sa version initiale. Un texte qui renforce une politique migratoire déjà très attentatoire à la dignité et au respect des droits fondamentaux des personnes.

Au point qu’après avoir durci le texte, la commission des lois, derrière sa cape de défenseur des libertés individuelles a même pu, face à un texte d’une telle gravité, revenir sur l’existant pour la rétention administrative en rétablissant le maximum à 45 jours (contre 90). Le délai de recours devant la CNDA est également rétabli à 30 jours contre 15, amélioration à moindres frais cela dit puisque ce délai déroge déjà au droit commun (deux mois).

Finalement, ce n’est sûrement pas un hasard si les deux dernières polémiques liées aux expressions scandaleuses de « shopping de l’asile » de Nathalie Loiseau et de « benchmarking » de Gérard Collomb ont trouvé leur place au Sénat. La droite sénatoriale ne pouvait rêver d’un projet de loi mieux ficelé dans sa logique d’expulsion, d’enfermement et de criminalisation des exilés, lui permettant de finir la tâche.

Les lois de 2015 sur l’asile et 2016 sur les droits des étrangers ont ouvert et légitimé la logique de tri et le principe de suspicion qui contaminent tous les dossiers des personnes venues chercher protection sur notre sol.

Conscients de leur responsabilité historique et forts d’un long travail mené en amont avec les opposants au texte (associations, défenseur des droits, CNCDH,…), les sénatrices et sénateurs du groupe CRCE mèneront le combat dans l’hémicycle contre ce projet de loi indigne des valeurs de notre République, patrie des Droits de l’Homme, en s’opposant aux mesures portant atteinte aux droits fondamentaux des personnes et en proposant des solutions concrètes et humaines pour l’accueil sur notre territoire de ceux qui sont venus y chercher refuge.

Retour en haut