Lois
Avant d’être débattu et voté en séance publique, chaque projet ou proposition de loi est examiné par l’une des sept commissions permanentes du Sénat : lois, finances, affaires économiques, affaires étrangères et Défense, affaires culturelles, affaires sociales, aménagement du territoire et du développement durable. Classées par commissions, retrouvez ici les interventions générales et les explications de vote des sénateurs CRC.
Il faut mieux encadrer le statut de pompier volontaire et le rendre plus attractif
Sécurité civile (conclusions de la CMP) -
Par Éliane Assassi / 26 octobre 2021Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, le 5 octobre dernier, un article de presse intitulé « Incendies : le drôle de statut des pompiers envoyés en renfort » revenait sur la situation révélée après les feux de forêt qui ont récemment eu lieu dans le Var. Des centaines de pompiers professionnels, pour se relayer afin de lutter contre le feu, ont dû poser des congés et passer sous le statut de pompier volontaire.
Ces consignes écrites par les SDIS remettent en question les obligations relatives au droit du travail. Cet épisode nous rappelle le rapport de 2019 de la Cour des comptes, où étaient soulevés les problèmes liés au temps de travail et au double statut des pompiers en France, qui sont des manières de répondre aux impératifs de secours quotidien avec des moyens limités.
La présente proposition de loi ne donne pas de solution à ces problèmes de fond. Nous en avons supprimé l’article 22 A, qui n’avait pas d’impact sur la réglementation européenne fixant à 48 heures le temps de travail hebdomadaire maximum, et que nous ne pourrons pas continuer à contourner indéfiniment.
Nous défendons avec force notre modèle de sécurité civile fondé sur le volontariat et l’engagement citoyen. Mais pour le préserver, il faut nécessairement mieux encadrer le statut de pompier volontaire, ce qui permettra également de le rendre plus attractif. La présente loi y contribue en partie, grâce à des revalorisations et à une plus grande reconnaissance, mais sans affronter le problème majeur.
Cela implique également de renforcer les effectifs de pompiers professionnels, afin que les volontaires ne soient pas une simple main-d’œuvre excessivement utilisée, car financièrement plus rentable.
Les remontées des SDIS sur ces pratiques sont faibles, alors qu’une plus grande transparence permettrait de mener un vrai travail à ce sujet. L’organisation d’assises nationales de la sécurité civile irait dans ce sens, surtout au regard des dernières mobilisations importantes des pompiers, qui dénoncent leurs conditions de travail et le manque de personnels.
Les services d’incendie et de secours doivent faire face à des dépenses contraintes, à des interventions en augmentation, à une fragilisation des recrutements de volontaires alors que ces derniers représentent 79 % des pompiers, et à un financement par les départements qui connaissent des situations financières instables. Les défauts de moyens dans les services publics, comme dans les hôpitaux d’ailleurs, amènent les pompiers à aller au-delà de leurs missions et à combler ce recul de l’État, alors qu’ils sont eux-mêmes en sous-effectif chronique.
Où sont les dispositions relatives aux effectifs et aux moyens financiers ? Je vous l’avais rappelé, le nombre de centres d’incendie et de secours chute, tout comme les dotations d’investissement.
Nous voterons le texte élaboré par la commission mixte paritaire, car il acte des avancées positives pour nos pompiers, notamment une meilleure reconnaissance des évolutions de leurs missions et un meilleur encadrement de leur action. Le Sénat a ainsi permis la requalification a posteriori des interventions en carence ambulancière.
Le président Macron a annoncé le 16 octobre dernier que l’indemnisation des SDIS serait revalorisée et passerait de 124 euros à « au moins 200 euros » par carence. Nous espérons que cette promesse sera tenue, car une telle revalorisation est très attendue et apaisera les conflits entre SDIS et SAMU.
Les débats demeurant autour des plateformes uniques montrent bien que la délimitation des compétences entre les différents acteurs de l’urgence demeure complexe, mais nous espérons que l’expérimentation permettra de dessiner des solutions, et nous sommes satisfaits que notre amendement visant à intégrer l’activité des plateformes déjà existantes à l’expérimentation ait été conservé dans le texte. Ces retours d’expérience sont précieux.
Mais cette loi ne résoudra pas la situation de tensions des services d’incendie et de secours. L’État doit être le garant de l’égalité des secours pour tous les citoyens, sur tout le territoire. Aujourd’hui, il faut de nouveaux moyens pour assurer cette proximité, mais également pour mieux protéger nos pompiers, qui sont de plus en plus victimes d’agressions. Les politiques d’austérité ou de surveillance appliquées depuis plusieurs gouvernements n’y répondent pas, pas plus que les mesures d’affichage comme la revalorisation de la prime de feu, en réalité financée par les départements.
Cette proposition de loi a été votée à l’unanimité dans les deux chambres du Parlement. Elle nous réunit sur un sujet qui concerne la sécurité de toutes et de tous. Notre groupe votera cette loi, mais nous estimons qu’elle doit maintenant permettre d’engager un débat conduisant à des avancées bien plus poussées concernant les conditions de travail et l’organisation des services d’incendie et de secours.